Chaque année, le 8 novembre, nous célébrons la Journée de commémoration des personnes intersexuées, également connue sous le nom de Journée de solidarité avec les personnes intersexuées. Nous profitons de cette occasion pour reconnaître et faire connaître les préjudices subis par la communauté intersexe, mais aussi pour reconnaître sa force et sa résilience. La communauté intersexe entretient depuis longtemps un lien unique et merveilleux avec la communauté 2ELGBTQI+ au sens large, mais ses luttes uniques pour les libertés et les droits fondamentaux sont souvent ignorées. La Journée de commémoration des personnes intersexuées est un rappel pour nous, en dehors de la communauté intersexe, d’écouter, d’apprendre et de réaffirmer notre engagement à lutter pour les droits des personnes intersexuées partout où nous le pouvons.
La date du 8 novembre a été choisie pour commémorer l’anniversaire d’Herculine Barbin, une femme intersexe qui a vécu en France au XIXe siècle. Elle a été assignée au sexe féminin à la naissance, mais après avoir avoué à un prêtre qu’elle était tombée amoureuse d’une femme, celui-ci lui a demandé l’autorisation de la faire examiner par un médecin. Après avoir découvert qu’elle était intersexuée, une décision de justice l’a déclarée de sexe masculin. Barbin s’installe à Paris, où elle commence à écrire ses mémoires tout en vivant dans la pauvreté. Ses mémoires ont été traduites par Michael Foucault en 1980, ce qui a permis de faire connaître à un large public son sentiment d’avoir été « déshéritée » et soumise à une « inquisition ridicule ». Ses mémoires décrivent que Barbin se considérait comme une « femme exceptionnelle », mais une femme quand même, indépendamment de ce que pensait la société. Elle a fini par mettre fin à ses jours huit ans après la décision judiciaire, mais sa mémoire est restée vivante, non seulement grâce à la Journée du souvenir intersexe, mais aussi grâce à des références à sa vie dans des ouvrages tels que le célèbre ouvrage de Judith Butler intitulé Gender Trouble (Trouble dans le genre).
La journée de sensibilisation à l’intersexualité (qui a lieu le 26 octobre) est généralement la plus connue en Amérique du Nord, mais l’histoire d’Herculine Barbin résume parfaitement la raison pour laquelle la journée de commémoration de l’intersexualité est une occasion si cruciale. Les personnes intersexuées sont confrontées à une violence à la fois individuelle et systémique qui peut être fatale. La Journée de commémoration des personnes intersexuées est donc l’occasion pour nous de réfléchir aux personnes touchées par cette cruauté et d’œuvrer pour y mettre un terme pour de bon.
Les préjugés à l’encontre des personnes intersexuées (et donc l’objet de l’activisme de la communauté) se manifestent sous une multitude de formes différentes. Il peut s’agir de chirurgie « corrective » et irréversible pratiquée sur des enfants bien trop jeunes pour donner un consentement éclairé, d’un manque de reconnaissance juridique, d’équité et de protection contre la discrimination, ou encore de sectarisme de la part d’individus ou du système social dans son ensemble. Les militants intersexes ont lutté sans relâche contre tous ces problèmes et d’innombrables autres depuis des décennies, et nous prenons le temps, à l’occasion de La Journée de commémoration des personnes intersexuées, de commémorer leur incroyable travail.
Les personnes intersexuées existent depuis l’aube de l’humanité, vivant, aimant et trouvant la joie comme toute autre personne, et elles ont immensément contribué à l’avancement du militantisme dans toutes sortes de communautés. Jim Sinclair, par exemple, a accompli un travail incroyable au sein du mouvement pour la neurodiversité. Xe a été la première personne à formuler la position des « droits de l’autisme », et son essai anti-cure de l’autisme « Don’t Mourn for Us » est largement considéré comme un texte fondateur de ce mouvement. Xe a également été la première personne autiste documentée à rejeter le concept de « langage centré sur la personne ». Gigi Raven Wilbur, qui s’identifie comme une « hermaphrodite » bisexuelle, est une autre militante intersexe pionnière. Elle est l’une des trois personnes bi+ qui ont organisé la toute première journée « Celebrate Bisexuality+ Day » (Célébrons la bisexualité).
La lutte pour les droits des intersexes ne se limite en aucun cas au 8 novembre, mais doit être poursuivie sans relâche tout au long de l’année pour que le progrès continue d’éclipser l’ignorance. Les personnes intersexuées constituent aujourd’hui et pour toujours une communauté magnifique, diverse et tenace, et nous devons nous assurer d’écouter leurs voix alors que nous travaillons à un avenir plus radieux.