Ce mois de mars marque le 12ᵉ Mois de la santé Bisexuelle+, un événement qui nous rappelle les inégalités auxquelles font face les personnes Bi+, non seulement en matière de santé physique et mentale, mais aussi dans leur parcours au sein des systèmes médicaux.
Le Mois de la santé Bisexuelle+ a été lancé pour la première fois en 2014 par le Bisexual Resource Center, une organisation fondée en 1985 qui se consacre à offrir du soutien, des ressources et une communauté aux personnes Bi+ à travers le monde. L’idée de consacrer un mois aux défis spécifiques liés à la santé des personnes Bi+ est née lorsque, pour la première fois, les données sur les personnes 2SLGBTQIA+ ont cessé de les traiter comme un groupe homogène. Les statistiques sont des outils essentiels pour informer et sensibiliser, et elles jouent un rôle clé dans la lutte pour les droits humains. Cependant, le manque de représentation, une catégorisation imprécise ainsi que les biais et les mauvaises interprétations volontaires des données peuvent parfois causer plus de tort que de bien. Heureusement, grâce au militantisme d’activistes à travers le monde, des avancées importantes ont été réalisées ces dernières années afin de garantir une représentation plus juste et plus précise des réalités vécues. L’une de ces avancées a été la reconnaissance du fait que les différentes identités au sein de la communauté 2SLGBTQIA+ vivent des expériences très distinctes. Il est donc irresponsable de regrouper toutes ces réalités sous une seule et même catégorie dans les recherches et les données.
Grâce à ces progrès en recherche et en représentation des données, il a enfin été possible d’avoir une image plus précise de la santé des personnes 2SLGBTQIA+, y compris celle des personnes Bi+. Cela a révélé que les personnes Bi+ ont une relation à la santé très différente des autres membres de la communauté 2SLGBTQIA+. On estime aujourd’hui que plus de la moitié de la population 2SLGBTQIA+ s’identifie comme Bi+. Pourtant, elles font face à des disparités considérables en matière de santé physique et mentale, non seulement en comparaison avec les personnes hétérosexuelles, mais aussi avec les personnes homosexuelles. Même avec les avancées en recherche, de nombreuses études continuent de ne pas reconnaître les personnes Bi+ comme une communauté distincte. Ainsi, bien que les statistiques actuelles révèlent une situation alarmante, la réalité pourrait être encore pire.
Les inégalités en matière de santé Bi+ se manifestent dans de nombreux domaines, tant physiques que mentaux. Les personnes Bi+ sont plus susceptibles d’avoir un taux de cholestérol élevé et de souffrir d’asthme par rapport aux adultes hétérosexuels. De plus, les taux élevés de consommation de substances au sein de la communauté Bi+ peuvent aggraver d’autres problèmes de santé à long terme.
En matière de santé mentale, les personnes Bi+ sont deux fois plus susceptibles de souffrir de dépression que les personnes hétérosexuelles et sont aussi plus enclines aux comportements d’automutilation. Pire encore, elles sont trois fois plus susceptibles d’avoir des pensées suicidaires, une statistique des plus inquiétantes.
En ce qui concerne la santé sexuelle, les personnes Bi+—et en particulier les hommes—sont beaucoup moins susceptibles de se faire tester pour le VIH, ce qui entraîne une incidence disproportionnée de cette infection dans leur communauté. Ces statistiques sont aggravées par les obstacles que rencontrent les personnes Bi+ lorsqu’elles tentent d’accéder aux soins. La biphobie est un problème mondial, et la moitié des femmes Bi+ au Royaume-Uni affirment en avoir été victimes dans un cadre médical. Selon le Williams Institute, 39 % des hommes Bi+ et 33 % des femmes Bi+ choisissent de ne pas divulguer leur identité à un professionnel de la santé, comparativement à seulement 13 % des hommes gais et 10 % des femmes lesbiennes. Cela illustre à quel point de nombreuses personnes Bi+ se sentent en insécurité lorsqu’elles tentent d’obtenir des soins.
Comme pour toute question liée aux droits humains, l’intersectionnalité est un élément clé à considérer lorsqu’on parle de la santé des personnes Bi+. Les personnes trans et racisées font partie intégrante de la communauté Bi+ et font déjà face à un système médical marqué par la discrimination, la désinformation et des barrières structurelles. Elles sont également statistiquement plus susceptibles d’être confrontées à certains défis de santé. Subir les inégalités propres aux personnes Bi+ ne fait qu’exacerber ces difficultés.
Les personnes assignées femmes à la naissance (AFAB) rencontrent aussi des défis liés à leur sexe biologique, en plus de ceux découlant de leur identité. Les personnes Bi+ AFAB sont plus susceptibles que la population AFAB générale de souffrir de cancer du sein—ainsi que de nombreux autres cancers—et elles présentent également des taux plus élevés de maladies cardiaques et d’obésité. De plus, elles sont bien plus à risque que les personnes hétérosexuelles ou lesbiennes de développer des problèmes de consommation de substances ou des troubles alimentaires.
Un autre enjeu majeur est que les personnes Bi+ AFAB sont moins enclines à chercher des soins préventifs comme des mammographies ou des tests Pap, en raison du risque de faire face à de la discrimination, qu’elle soit implicite ou explicite, lorsqu’elles tentent d’accéder à ces soins.
L’amélioration de la santé des personnes Bi+ est un long processus qui nécessite des efforts à plusieurs niveaux. Mais il y a une action simple que nous pouvons tous entreprendre : sensibiliser et nous éduquer. L’absence de discussion sur la santé Bi+ contribue directement au manque de recherche et de programmes de soutien dédiés. Parler de ces enjeux et éduquer le public sur la santé Bi+ non seulement en mars, mais tout au long de l’année, est un pas essentiel vers une meilleure prise en charge.
Si vous souhaitez en apprendre davantage sur la santé Bi+, la Human Rights Campaign propose un excellent résumé des inégalités en santé vécues par les personnes Bi+, comparativement aux personnes hétérosexuelles, gaies et lesbiennes. Elle offre aussi des ressources pour trouver des professionnels de santé culturellement compétents, ainsi que des stratégies pour les alliés, les défenseurs des droits et les professionnels de la santé afin qu’ils puissent mieux soutenir les personnes Bi+.
Le thème du Mois de la santé Bisexuelle+ cette année est « Naviguer la santé Bi+ dans un monde incertain ». Il est indéniable que ces derniers mois ont été marqués par une montée des tensions et des menaces à l’égard des personnes 2SLGBTQIA+. Pour celles qui ont besoin de soins de santé, la situation est encore plus préoccupante, que ce soit aux États-Unis ou même dans certaines régions du Canada. Ce thème souligne la nécessité de se mobiliser et de défendre les droits des personnes Bi+ à accéder aux soins dont elles ont besoin.
En cette édition du Mois de la santé Bisexuelle+, réaffirmons notre engagement à construire un monde où chacun.e a accès aux soins de santé comme un droit humain fondamental.